[Festival Jazz à Vienne (1989). Concert de Miles Davis]

[Festival Jazz à Vienne (1989). Concert de Miles Davis]
droitsCreative Commons - Paternité. Pas d'utilisation commerciale. Pas de modification.
localisationBibliothèque municipale de Lyon / P0741 FIGRP00253 010
technique1 photographie négative : noir et blanc ; 24 x 36 mm
descriptionConcert de Miles Davis au festival Jazz à Vienne, 1er juillet 1989. Miles Davis (tp), Rick Margitza (sax), Adam Holtzman (kb), Kei Akagi (kb), Joseph "Foley" McCreary (b), Benjamin Rietveld (b), Ricky Wellman (dms) et Munyungo Jackson (perc).
historiqueBien vivant, Miles Davis. Et de retour [le 1er juillet 1989] à Vienne après cinq ans d'absence. Aux auditeurs déroutés-dégoûtés par son avant-dernier album, "Tutu", l'indomptable vieux bonhomme a réservé cette année une surprise en or massif, un nouveau trente dégraissé, tout en poursuivant dans la lignée du précédent. Le génial caractériel définitivement branché sur l'électronique pour continuer son exploration musicale devrait, selon les organisateur "présenter la musique de son prochain album, dont la sortie est très proche". Pour Miles Davis davantage que pour tout autre, difficile de présumer des événements, reste la certitude de retrouver "la" silhouette magistrale lovée sur sa trompette, des échappées (ou dérapages) foudroyantes. Et le plus stylé des personnages de la scène jazz internationale, capable d'entraîner à sa suite des sidemen triés sur le volet : Rick Margita (saxophones), John Beasley, Kei Akagi (claviers), l'éblouissant Joseph Foley Mc Creary à la basse six cordes, Benjamin Rietveld (basse), Ricky Wellman (batterie) et Munyungo Jackson (percus). En lever de rideau de cette première soirée, le très soft duo voix/guitare Tuck and Patti (Tuck Andress et Patti Cathcart) donnera la note, prévisiblement sans dissonance. Avec un style feutré-voilé réveillé à l'occasion par les qualités d'instrumentiste, le groupe idéalement représentatif d'un jazz susceptible de faire venir au jazz la frange la moins initiée du public. Source : "Le come-back de Miles" in Lyon Figaro, 1er juillet 1989, p.56.
historiqueAttendue par beaucoup, en raison de la présence de Miles Davis, la nuit [du 1er juillet] marquait le lancement de la quinzaine Jazz à Vienne et une manière de test, concluant, puisque le public arrivé en masse dès dix-neuf heures résistait héroïquement au déluge. Prévisible en dépit d'une grève persistante des services météo, au vu d'un ciel particulièrement sombre au-dessus du théâtre antique de Vienne, un premier orage se déclenchait vers vingt heures, provoquant une floraison de parapluies. Sur scène (abritée par un velum), vers 21 heures, le tandem Tuck Andress and Patti Cathcart remportait rapidement l'adhésion de l'auditoire, un peu sur la réserve au départ. Par petites touches, le couple recréait le climat intimiste et sentimental de son récent album. Saluée comme "tremendous talent" par le vieux Dizzy Gillespie soi-même, la chanteuse Patti Cathcart démontrait l'étendue de ses aptitudes vocales. Du scat au gospel, de ballade en hymne (Time After Time), brillamment enveloppée du jeu de guitare, technique et généreux, de son compagnon clairement en retrait, la dame imposait l'émotion, le swing, faisant même chanter le public conquis. Doucement troublant et nuancé, entrecoupé d'une variation instrumentale de Tuck Andress sur un thème de Santana, ce concert augurait on ne peut mieux d'une rapport public-artistes ouvert et chaleureux, conforme aux meilleurs moments viennois. Une façon d'aller droit au but dans le talent et de piocher sans hésiter dans le meilleur d'une musique "commerciale" à laquelle s'efforcent vainement les gentils Everything But the Girl. La tête sous l'eau et les pieds trempés, l'assistance ne pouvait que reconnaître une chose : le feeling était bien là. Et le charme aussi brillant que chaleureux des deux Californiens opérait parfaitement. Indéniablement ternie par les mètres cubes d'eau qui s'abattaient sur le site peu après l'arrivée sur scène de Miles Davis (à l'heure dite, contrairement aux inquiétudes des uns et des autres), la prestation et le personnage hypnotisaient suffisamment le public spongieux pour l'inciter à oublier le conditions climatiques. Et à se laisser captiver par les gimmicks du seigneur de la trompette, toujours parcimonieux lorsqu'il s'agit d'intervenir musicalement. Cadré au millimètre et retransmis sur écrans de part et d'autre de la scène, Miles Davis affichait son éternelle tête de furieux aux yeux blancs et dirigeait un backing band assez pesant, mais adapté à la musique multi-référenciée de celui qui a depuis longtemps décidé d'en finir avec les questions d'appartenances musicales et de courants-chapelles. D'extraits abondants de l'album "Tutu" en interprétations tirées de son dernier trente, "Amandla", Miles Davis, plutôt en bonnes dispositions, rejouait son vieux rôle de génie tyrannique et muet, dos tourné au public le plus souvent, concentré sur la direction de son groupe de musiciens. De techno beat en rythmique de basse funky, Miles Davis accrochait le plus gros du public, donnant même un moment fugitif quasi-classique, à l'image du "Mr Pastorius" de son dernier album. Fabuleusement énergique et mordant, le percussionniste Munyungo Jackson avait toute latitude en fin de concert pour secouer le rythme général et se lancer dans un bref one man show, qui lui permettait d'évoquer efficacement l'Afrique du Sud, puis de démontrer, non sans humour, sa virtuosité à mettre un public en transe. Le batteur Ricky Wellman s'engageait à sa suite dans un solo ébouriffant et hors de souffle, tout aussi efficace, et retransmis au mieux sur les écrans vidéo. Miné par la pluie, peuplé de roadies censés éponger la scène inondée, le concert s'est certainement ressenti des conditions de plein-air, tempérant l'enthousiasme du public qui n'insistait qu'à peine pour un rappel perdu d'avance. Source : "Jouons sous la pluie" / Pascaline Dussurget in Lyon Figaro, 3 juillet 1989, p.39.
note à l'exemplairePhotographie attribuée à Marcos Quinones. Ce reportage photographique contient 89 négatifs.
note bibliographiqueFestival Jazz à Vienne. [En ligne] : https://www.jazzavienne.com (consulté le 2 avril 2015). - Wikipédia. [En ligne] : https://fr.wikipedia.org/wiki/Miles_Davis (consulté le 2 avril 2015). - "Miles Davis à Vienne, avec lui le déluge" / Francis Marmande in Le Monde, 5 août 2020.

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